En ce début mai 2016, nous étions informés, par notre amie Fatma Kéfif, du décès de Jacques Houassi, qui fut Président jusqu’en 2014 de l’UDACFME du Rhône. (Union Départ. des Anciens Combattants Français Musulmans et de leurs enfants). Nous ne nous attendions pas à cette brutale disparition qui nous beaucoup touchés.
Car c’est une « figure » qui disparaissait. Plus qu’une « figure », une silhouette, un témoin (et quel témoin !), un exemple.
Nous envoyions immédiatement à tous nos amis internautes, le message suivant :
« Nous sommes tous affectés par cette disparition, et prions la Présidente Mme F.Kéfif d’accepter nos condoléances attristées qu’elle voudra bien transmettre à la famille de Jacques.
Nous ne reverrons plus la silhouette de notre ami, appuyé sur une canne, fidèle à toutes les manifestations du souvenir.
Nous n’entendrons plus son sympathique accent rocailleux, nous ne verrons plus son regard, plissé par des rides, qui avait vu tant de choses en Algérie, ce pays où il était né, comme beaucoup d’entre nous, et où il avait vécu des moments très durs, qui lui avaient laissés des séquelles physiques indélébiles.
Jacques Houassi, (10 ans en 1954), avait fini par échapper ‘par miracle’ à la vindicte de l’ALN, 8 ans + tard, en 1962. (voir ci-après un article de Mr Chauvy dans le Progrès de Lyon,).
Nous serons nombreux à lui rendre un dernier hommage, demain, 6 mai, au cimetière des Brosses, à Vaulx-en-Velin.
A lui personnellement, pour tout ce qu’il était. Un exemple de fidélité jusqu’à la fin, à son engagement de 1959.
Nous, ses amis ne l’oublieront jamais. Il a amplement mérité de reposer en paix maintenant ».
Philibert Perret.
La longue marche de Jacques le harki. Article de Gérard Chauvy. Le Progrès de Lyon. 15/3/2012.
La tragédie des supplétifs musulmans. Jacques Houassi a échappé à la répression meurtrière
des harkis abandonnés par la France.
Il avait 10 ans en 1954. Mais très vite, les événements ont emporté le jeune homme qui parviendra, grâce à la Croix-Rouge, à gagner la métropole…
Il avait tout fait pour échapper aux fellaghas. Il avait 15 ans lorsqu’ils sont venus le chercher, pour « servir d’interprète », car « je parlais bien français et algérien ». Son père refusa mais il chercha conseil auprès de l’armée française qui accepta dans un premier temps de l’accueillir, en trichant sur son âge. Puis ce fut un passage au « C.F.J.A. », ces « centres de formation de la jeunesse algérienne » constitués par les autorités françaises.
Mais Jacques Houassi, grâce à un officier du 3 e Bureau, est finalement engagé dans l’armée. Il y sert notamment d’interprète. Après le 19 mars 1962, cependant, tout va changer. En juillet, il bénéficie d’une permission pour retourner dans sa famille, à M’sila, en Kabylie. Mais à peine arrivé, « on a frappé à la porte. Quelqu’un venait s’assurer si j’étais revenu pour de bon… ».
Son père comprend. « Il faut que tu partes, vite… ». Commence alors pour Jacques Houassi une longue aventure. « J’ai pris un car, je suis parti pour Bou Saada puis le lendemain à Alger, à la Cité la Montagne. Mais j’avais été suivi depuis M’sila. On m’a arrêté le soir même ».
En voiture, Houassi est ramené à M’sila avec des étapes humiliantes : « On me descendait de village et village pour me faire insulter, cracher dessus. Je suis arrivé complètement massacré ». A M’sila, à la caserne des GMS, 200 harkis étaient internés. « On nous faisait faire des travaux inutiles. On avait une flûte de pain pour douze. On buvait dans un bassin pour les chevaux. On est resté 3 à 4 mois. Puis on a été transféré à la prison de Batna, dans des camions : les femmes, les gosses nous jetaient des pierres, crachaient dessus »
C’est finalement grâce à plusieurs visites de la Croix-Rouge que le harki Houassi va s’en sortir. « J’ai été sévèrement tabassé parce que j’avais dit à la Croix-Rouge que nous n’étions pas des détenus de droit commun comme le disait le directeur ». Il a fallu de longues semaines pour que la Croix-Rouge, intervenant avec un détachement de l’armée française, viennent le chercher. « Seuls les jeunes ont accepté de partir pour la France. Les plus vieux, il faut les comprendre, ont voulu rester avec leur famille ». Houassi passera encore trois mois dans une caserne occupée par les Français, à Philippeville. Il a contacté ses parents pour leur demander de tout faire pour le rejoindre en France où il arrive enfin, en août 1963, à Marseille. Mais comme beaucoup, il est dirigé sur le camp de Rivesaltes de triste mémoire, le même qu’avaient connu Républicains espagnols puis juifs et tziganes. Houassi, en conflit avec le capitaine du camp, est contraint de partir : « On m’a donné un vieux costume taille 52 – je faisais du 36 – et 200 francs, un billet de train ». Destination Lyon. Où il se rend à la préfecture et grâce à l’appui de plusieurs officiers il va trouver du travail et s’installer définitivement dans la ville. Echappé d’un enfer où, par milliers, harkis, mogazhnis et autres supplétifs n’ont pu trouver de planche de salut. Gérard Chauvy
Des hommages ont été rendus à Jacques Houassi, lors de la journée Nationale d’Hommage aux Harkis, le 25/9/2016 à Lyon, devant le Monument aux Morts d’Oran-La Duchère. (texte Général.Lescel, lu par F.Kéfif).
Les avait précédés, l’article de Jacques Nardin, in bulletin de la Farac. (A.Combattants) de juillet 2016.
Ces textes seront publiés dans la prochaine circulaire du Cercle Alg. de Lyon.